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12 juin 2007

Le terrible jour où ma réduction chez le boulanger cessa d'être

Ce jour, j'aurais dû le voir venir. Les petits sourires faiblissaient, tous les jours un peu plus. Je ne m'alarmai point. Un peu de soucis dans sa vie, sûrement. Les femmes de boulanger, c'est jamais totalement ça, vous savez. Ou vous ne savez pas, je ne sais pas. Mais les merci / bonjour / au revoir / comment allez-vous  qu'on ne m'adressait plus dans la rue depuis quelques semaines, ça, vraiment, ça aurait dû me mettre la puce à l'oreille. Mais je ne suis pas chien envers moi-même, il y a des signes que nous ne sommes jamais prêts à percevoir à temps. Les croissants à la framboise tout d'abord, qui certains jours n'étaient pudiquement "plus disponibles". Toujours le mardi, comme de par hasard, le jour où je venais les chercher. Sachant que sa tactique ne pouvait se poursuivre indéfiniment sans que je ne m'aperçoive avec clairvoyance suspicieuse de la chose, il dut se renouveler dans sa machiavélante besogne. Le jour vint enfin où je demandais mon croissant à la framboise, et pour la première fois, on me le donnait sans calcul pensai-je, puisque sans aucune excuse bidon, du genre vous savez "y'en a plus" ou "ah on m'a pris le dernier juste avant vous". Non, il me le tendait l'ahuri. Souriant même. Qu'est-ce que ça cachait? Et voilà son dard, son épique pique : "Ca fera 90 centimes d'euros". Je tend la main, incrédule. J'ai la main encore ouverte vers lui. Mais non, il sourit de plus en plus. Aucun geste de notre part. Un duel au soleil couchant. Il est 16h. Les revolvers sont de sucre. Il a gagné. Pour la première fois en un an, il ne m'a pas fait sa ristourne spéciale "vous êtes un client privilégié que je veux fidéliser". Il ne m'a pas offert un deuxième croissant à la framboise gratuit. Son offre spéciale qui me prévalait d'un certain statut dans la bourgade. La chute. La fin des privilèges. A peine avais-je réalisé ce qui m'arrivait, qu'en sortant mon sachet à la main contenant un unique croissant malingre, la milice mit la main sur moi. Les menottes aux poignets, je montai dans le fourgon. Le sachet dilapidait son sucre dans l'eau du caniveau. Le poteau d'exécution était unique aussi, alors qu'on m'y attachait. La rasade supplémentaire de balles qu'on me réserva n'était pas chiche, elle, par contre. Et ma face, par terre, inondait de sang les rigoles du parvis. Le drapeau était haut, et c'était un beau jour.

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Commentaires
T
Il faudra sûrement que je m'y habitue. Celà semble un standard de ce site. Tant mieux !<br /> <br /> Fragmentaire, délicieux, intriguant, qui ne se dévoile qu'à moitié, comme un goût subtile et fugace...
K
framboise !!!!!!! ^^
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